Il se passe de drôles de choses dans les grandes surfaces, à la rentrée.

Deux ou trois malheureux meubles de jardins dépareillés, en super-promo, ne trouvent plus preneurs. Eux qui formaient début juillet un magnifique ensemble harmonieusement disposé sur un tapis de verdure.
Quatre ou cinq bateaux pneumatiques à moitié dégonflés errent quant à eux sans attaches, alors qu’il y a encore quelques semaines, ils étaient les éléments avancés d’une flotte entière qui nous présentaient les honneurs pavillon haut. Et pour fermer la marche, un pauvre barbecue désœuvré fait grise mine depuis qu’il sait qu’il devra attendre la saison prochaine dans un hangar glacial, avant d’espérer pouvoir mettre le feu sous un ciel étoilé.

C’est que tous ces instrument

s de sieste, de joie et de rire, ont dû céder la place à leur ennemi annuel : les fournitures scolaires : objets utiles, importants, et sérieux… eux !

On pourrait penser que “la vie austère“ a envahi les rayons débordant de trousses, sacs à dos, gommes et stylos !

Pourtant, surprise ! Ce sont des rires, des exclamations et des cris que l’on entend. Nos malheureux compagnons du rayon “vacances“ doivent se rendre à l’évidence lorsqu’ils voient les petites filles et les petits garçons passer devant eux crânement, sac au dos, sans un regard : “Ils sont fiers et joyeux, les mômes !“, pensent-ils, attristés.

Les marques sont en grande partie responsable de l’excitation que l’on peut observer dans toutes les grandes surfaces en ce moment.
Nous le constatons tous, nos enfants ne veulent pas un sac, une trousse ou un stylo, mais un sac Eastpak, une trousse Hello Kitty, un stylo Batman.

Les tendances de cette rentrée sont l’achat rock’n’roll, l’achat malin et l’achat responsable.

Ainsi, vous retrouverez dans vos rayons la panoplie complète des années 60-70 : perfecto, basket punk, bombers, vans et autres tee-shirts vintage avec impressions des pochettes de 33 tours… Pour se faire une rentrée rebelle.

Vous trouverez aussi les marques telles que Plein Ciel, Cultura, Gibert ou Virgin associées dans l’opération “Économisez, achetez des marques“ pour une rentrée raisonnable et lutter contre le poids grandissant des marques distributeurs.

Enfin, citons le Kit Plio qui, sur 5 euros, reverse 1 euro à Handicap International ou Clairefontaine qui redonne 0,30 euro à l’Unicef pour la scolarisation des enfants dans le monde, pour une rentrée “bonne conscience“.

Quelques conseils pour les parents qui redoutent l’épreuve des achats de fournitures scolaires marquées et… surfacturées ?

Suivez le guide

La meilleure manière d’aborder le rayon est de proposer à votre enfant de vous faire découvrir lui-même toutes les marques sans rien acheter… pour commencer. Un tour de chauffe en quelque sorte.
Bien sûr, vous, vous avez la liste des objets sérieux et importants, mais vous acceptez de perdre du temps juste pour regarder, comparer, et découvrir les innovations. Votre intérêt fera de vous un partenaire de l’achat et non un censeur pressé et toujours trop raisonnable.

Jouez au caddy le moins cher

Pourquoi ne pas transformer votre enfant en Sherlock Holmes des prix les plus bas ? C’est que l’allocation de rentrée scolaire (272 euros par enfant) est vite dépensée.

Faites le jouer au “juste bas prix“, vous verrez que c’est la meilleure façon de le sensibiliser à la réelle valeur ajoutée des marques de fournitures scolaires.
Il se rendra compte par lui-même qu’il faut choisir… Cet arbitrage que vous réalisez avec lui en direct sera l’occasion d’une pédagogie (après tout, c’est la rentrée…) de votre consommateur en herbe. Vous pourrez ainsi montrer que tel cartable fashion, à édition limitée vaut le surcoût affiché alors que tel cahier 30 % plus cher que la moyenne qui surfe sur le lancement de Batman ne “les vaut pas“…

Cédez sur un objet marqué

Ne tardez pas à céder sur un bel objet marqué. Il va capter l’attention de votre consommateur vorace et calmer sa fièvre acheteuse. C’est le moment que vous choisirez pour ressortir la liste et remplir le caddy de marque distributeur par exemple pour les fournitures classiques…

Résister à la panoplie

Les uniformes ont été supprimés il y a plusieurs décennies en France. Pourtant l’usage uniforme et conforme des marques tend à transformer les élèves en mannequins vedettes, avec leurs parents complices. Si vous voulez que votre enfant “s’enrichisse des mutuelles différences“ chères à Paul Valéry, résistez farouchement à lui offrir la panoplie complète du surconsommateur de marques mondiales. Ils risqueraient de ressembler aux autres !

Vos enfants se précipitent dans les bras des marques dès la rentrée ?

C’est normal et c’est heureux. Félicitons-nous que les marques égayent la rentrée de nos enfants, et leur donnent le sourire pour attaquer les quelque 250 jours d’école qui les attendent…

Mais la rentrée, c’est aussi la nôtre, celle des parents, des éducateurs. Et éduquer c’est étymologiquement “conduire hors de… séparer“. Séparer les vraies marques des fausses ; les vraies valeurs, des fausses; les vrais prix des faux…

Voilà un premier travail de rentrée pour les parents. Parvenir à conduire votre enfant “hors du magasin“ en ayant encore de quoi s’offrir… les prochaines vacances !

Denis Gancel

* Ce titre est emprunté à une émission radio de Jacques Martin et Jean Yann, qui, le dimanche après-midi, lançaient de façon horrible : “Chouette, demain c’est lundi !“.