#fuckleglobish

LES POSTS DES BOSS Renault
LES POSTS DES BOSS Renault

Le redressement productif est en marche. Renault, marque française préférée des français (Source Observatoire de la Marque France 2013), a trouvé la solution de reconquête du marché automobile mondial : un tiroir ! Mais pas n’importe quel tiroir : Succédant au “Quality made in France”, position d’entreprise louable en elle-même, c’est via l’innovation que le constructeur français se distingue. Il invente Le tiroir Easy life !
C’est l’un des arguments du nouveau Renault Captur dont la dernière voyelle, comme dans le roman de Perec, s’est fait la malle, disparue corps et bien, digérée par le baragouinage à deux balles des complexés de la langue de Molière.
Le Renault Captur est un Crossover (pfffffff…) parce qu’il faut bien ça pour traverser Bécon-les-Bruyères. Dans ce vaisseau du XXIe siècle, la boite à gants de nos vieilles autos a vécu. Le tiroir Easy life la remplace et c’est tout autre chose. Une grande idée, proclame Renault (Si, si, j’ai lu la notice). Si grande que notre langue est bien trop petite pour en exprimer l’ambition.

Là où nos voisins allemands instillent la leur sans complexe pour vendre leurs voitures partout dans le monde – Vorschprung durch Technik d’Audi, Wir leben Autos d’Opel, Das Auto de VolksWagen -, nous préférons nous cacher derrière de piètres anglicismes et fantasmer un usage de l’anglais qui masquerait la trivialité de la proposition.
Quelle idée se fait-on des clients et de leur discernement? A-t-on à ce point honte de ce que nous sommes pour ainsi démissionner et abandonner ce terrain d’influence aussi puissant que la langue ?
Alors que fleurissent aux quatre coins de la planète des marques parfois sans queue ni tête choisies parce qu’elles “sonnent” français – Lalala, boite de nuit à Shanghaï, Petit Marie, agence matrimoniale au Japon, Cocue, boutique de mode à Tokyo ( !!!) ou bien encore Comme ça du mode, pour slogan d’un grand magasin japonais – alors qu’il est attribué à la France la première place en termes de créativité dans le monde (Source NGO 2013), nous en laissons filer son principal viatique.
Quelle est donc cette paresse de l’esprit qui nous inféode à des formules toutes faites où l’emphase le dispute au ridicule ?
La concision, l’impact sonore répondent les traitres et les félons…
Overbooké, neuf lettres. Occupé, six lettres.Challenge, neuf lettres. Défi, quatre lettres.
Bon, OK (deux lettres), c’est tellement plus chic d’être totalement overbooké pour un challenge, qu’être laborieusement occupé à relever un défi.
Nos cousins Québéquois, pourtant cernés, résistent avec intransigeance. Ils clavardent en ligne et gazouillent sur leurs téléphones intelligents. Le samedi, ils magazinent et ne s’en portent pas plus mal.
Les langues se nourrissent des influences multiples qui les polleinisent. Le globish les colonise et les épuise comme il épuise peu à peu la richesse de l’anglais. D’anglicismes inutiles en barbarismes automatiques, s’installe une situation de fait qu’on ne conscientise même plus. Servitude volontaire, syndrome de Stockholm, nous sommes devenus les otages indulgents d’une pensée moyenne mondialisée pauvre de 500 mots.

Renault, comme ses concurrents, lançait en 2007 son Label de développement durable Eco2. Si chacun s’accorde à penser qu’il est de la responsabilité des entreprises de s’engager sur des voies plus respectueuses de l’environnement et de la biodiversité, l’idée que les langues et les cultures participent d’un même foisonnement vertueux ne s’impose hélas pas.
Les aires linguistiques ne sont pas des forteresses, ce sont de luxuriantes réserves biologiques. Il est de la responsabilité de tous ceux qui produisent du sens, du langage, des messages destinés au plus grand nombre d’en prendre soin et de les protéger.

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