« La motivation au travail » : une étude Viavoice pour W&Cie

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Existe-t-il un problème de motivation au travail en France ? Si nos chiffres indiquent qu’une majorité d’actifs français (56 %) se déclarent aujourd’hui motivés au travail, cette proportion est largement inférieure aux résultats obtenus auprès des actifs britanniques ou allemands. En cause, selon les personnes interrogées ? Une précarité davantage ressentie (ou crainte ?) que par nos voisins, mais également une « pression » moins acceptée.

Des Français moins motivés au travail que leurs voisins européens

Les actifs français sont beaucoup moins nombreux à se déclarer motivés au travail (56 %) que les actifs britanniques (78 %) ou allemands, ces derniers apparaissant comme les champions de la motivation professionnelle puisque 80 % d’entre eux se déclarent « motivés », dont 28 % « très motivées » (contre 12 % des actifs français et 24 % des actifs britanniques). Cette nette différence entre la France et ses voisins est d’autant plus manifeste en prenant en compte certaines catégories d’actifs :

– Les salariés du secteur privé en France sont moins motivés que leurs homologues du secteur public (52 % « motivés » dans le privé contre 61 % dans le public), une différence qui ne se retrouve ni en Allemagne ni au Royaume-Uni ;
– Les « séniors » apparaissent beaucoup moins motivés en France que les « juniors » : 71 % des actifs français de moins de 25 ans et 65 % des 25-34 ans se déclarent motivés au travail, contre 50 % des 45-54 ans et 51 % des plus de 55 ans. Là encore, ces différences ne se remarquent pas chez nos voisins.

La passion pour son travail : un levier de motivation essentiel et partagé

Au palmarès des sources de motivation exprimées par les personnes se déclarant « motivées », l’« intérêt » pour le travail est très nettement privilégié, que ce soit par les actifs allemands (pour 60 % des personnes se déclarant motivées), français (44 %) ou britanniques (39 %). Le fait toutefois que les Allemands fassent davantage part de leur passion pour leur métier constitue une des clefs d’explication d’une motivation plus forte qu’ailleurs.

Auprès des actifs britanniques, on remarque également une cristallisation autour de cet enjeu de l’intérêt pour son travail en tant que source de motivation, mais aussi très souvent de démotivation : ainsi 41 % des actifs britanniques « pas motivés » expriment une grande lassitude, voire un rejet vis-à-vis de la profession qu’ils exercent, en faisant la principale raison de leur mal-être au travail.

Comment expliquer la plus faible motivation des actifs français ?

Les causes de démotivation selon les pays sont relativement proches et s’expliquent par trois raisons immédiates que sont le manque de reconnaissance (financière ou matérielle), la pression managériale ou encore de mauvaises conditions de travail. En France, on identifie des causes de démotivation plus intenses qu’en Angleterre ou en Allemagne :

– Le sentiment de précarité : la peur de perdre son travail ou la peur pour l’avenir de son entreprise est particulièrement présente en France (elle est exprimée par 23 % des actifs français « pas motivés » contre 9 % en Allemagne et 8 % au Royaume-Uni) alors même que le code du travail est souvent considéré comme plus protecteur. Qui plus est, la question de la précarité soulevée par les actifs français est singulièrement observable auprès des catégories de salariés les moins motivées en France que sont les salariés du secteur privé ou encore les « séniors ».

– La « pression » (notamment managériale) et l’ambiance de travail ressortent particulièrement parmi les causes de démotivation citées par les actifs français (25 %) ou allemands (28 %), alors que les Britanniques incriminent davantage le manque d’intérêt pour leurs fonctions.

Une crise de la fierté d’appartenance ?

Les manifestations de salariés lors des fermetures d’entreprises révèlent un attachement lorsque la situation est compromise et qu’il est parfois trop tard… Qu’en est il dans la vie courante ? L’étude consacrée à la psychologie collective (Viavoice pour W&Cie) a appris que les Français redoutent la mondialisation qu’ils perçoivent, plus que leurs voisins, comme une « menace ». Globalement, le manque de motivation en France s’explique donc par des attentes fortes à l’égard du travail, insatisfaites sur plusieurs registres : besoin de reconnaissance, besoin de sérénité (dénonciation du stress et de la pression), besoin de stabilité (dénonciation de la précarité), besoin de bonnes conditions de travail.

Ainsi s’exprime l’actualité et l’importance d’une spécificité française : la critique d’une vision purement fonctionnelle du travail qui invite tous les acteurs à faire évoluer leur mode de management vers une vision plus identitaire, plus valorisante, susceptible de renforcer une fierté d’appartenance mobilisatrice :

– Un travail qui définit une identité personnelle* : « il y a un peu de moi dans mon travail, mes attentes à l’égard de mon travail sont donc majeures » ;
– Un travail qui définit une identité de métier** : « mon travail est un savoir-faire, un ‘art’ réalisé par des ‘hommes de l’art’, là encore mes attentes à l’égard de mon travail sont donc majeures ». La motivation professionnelle « à la française » appelle donc des réponses qui tiennent compte de ces aspirations identitaires, et qui ne soient pas réductibles à des règles ou à des dispositifs internes.

Denis Gancel, W&Cie
Aurélien Preud’homme et François Miquet-Marty, Viavoice

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